De quoi les enfants ont-ils besoin pour être heureux ?
Entretien autour de points essentiels à l’épanouissement de nos enfants avec Armelle Regnier et Marie-Danièle Zuber.
Psychologue du développement, Armelle a commencé à travailler comme psychologue chargée d’études dans une société de conseil en marketing, spécialisée dans le marché enfant/adolescents/ famille. Puis elle a occupé un poste de psychologue scolaire.
Elle travaille aujourd’hui à son compte auprès d’enfants et d’adolescents.Psychologue clinicienne, Marie-Danièle Zuber démarre sa carrière dans le secteur psychiatrique avant de rejoindre l’équipe de l’association Enfance Majuscule en charge de la maltraitance infantile. Parallèlement à ce travail, elle assiste pendant 4 ans les clowns du Rire Médecin puis se spécialise en 2010 dans les pratiques systémiques et la thérapie familiale.
Aujourd’hui chez Pulse Center, elle travaille auprès des enfants et de leur famille pour les aider à comprendre et à surmonter les difficultés qu’ils rencontrent.Armelle, qu’appelle-t-on un enfant heureux ?
Avant toute chose, soulignons que le concept d’enfant heureux n’est pas figé, chaque parent, en fonction de ses valeurs, va définir ce qu’il conçoit comme étant le bonheur pour son enfant. Au delà de ces valeurs qui sont propres à chaque famille, certains points peuvent toutefois apparaître comme un dénominateur commun chez ces enfants que justement nous ne rencontrons pas dans nos consultations.Un enfant heureux est avant tout un enfant éduqué. Il a appris qu’il peut faire confiance à ce qu’il ressent. Ses parents l’écoutent, le respectent et le guident vers la connaissance de lui-même en mettant en valeur ses qualités, ses forces, mais aussi en lui montrant ses limites et les petits travers sur lesquels il devra faire des efforts pour mieux s’adapter à son environnement. Du fait de la bonne connaissance qu’il a de lui même, l’enfant heureux peut s’accepter lui-même, avec ses qualités et ses faiblesses.L’enfant heureux est aussi quelqu’un qui a appris qu’il n’est pas tout seul, autrement dit c’est un être social, qui a développé un sentiment de l’autre. Il développe du lien avec autrui, et peut respecter les différences, être empathique. Il peut tolérer, même si c’est une expérience désagréable, que la présence de l’autre engendre pour lui des frustrations.Enfin l’enfant heureux est celui qui peut accepter que la réalité environnante lui impose des frustrations. Il tolère ces expériences désagréables que la vie impose, sans exprimer d’émotions disproportionnées.Au final, un enfant heureux est un enfant qui n’est pas malheureux, il profite des bonnes expériences mais il a aussi compris et accepte que la vie est inévitablement ponctuée de moments moins agréables qui provoquent des émotions négatives. L’essentiel étant que ces moments agréables prennent le dessus sur ceux qui le sont moins !Nait-on heureux ou le devient-on ?
Chaque enfant a en lui une capacité à être heureux, mais les tempéraments de chacun, et rappelons ici que chaque enfant est unique, vont rendre ce chemin vers le bonheur plus ou moins chaotique. Un enfant par exemple ayant un tempérament particulièrement anxieux aura probablement plus de mal à aller vers l’inconnu pour affronter des situations nouvelles qu’un enfant qui est curieux et aventurier de tempérament. C’est justement là où les parents peuvent jouer un rôle pour accompagner leur enfant sur ce chemin, en lui disant par exemple :
« J’ai compris que tu avais peur d’aller dormir sous la tente loin de moi, c’est la première fois et c’est normal que tu te sentes inquiet. C’est une perspective désagréable, mais je sais aussi que cela n’est pas dangereux pour toi et que tu ne risques rien ».En éduquant son enfant, on peut lui montrer le chemin vers le bonheur. Maintenant, les enfants apprennent aussi beaucoup en observant ce qui se passe autour d’eux, et nos propres réactions devant les aléas de la vie vont aussi leur servir de modèles.Marie-Danièle, le rapport à l’enfance a beaucoup évolué d’une génération à l’autre. N’éduquons nous pas aujourd’hui les enfants de façon trop aseptisée, assistée etc.… ?
Oui, les rapports avec nos enfants ont beaucoup évolués, la « génération » Dolto se retrouve parents à son tour. Très à l’écoute du discours des psys, pas toujours bien transmis et /ou mal interprétés, certains placent leur enfant au centre de toute leur attention au point d’en oublier ses besoins réels et qu’il est surtout un être en devenir.Quand l’enfant grandit il franchit de multiples étapes, où il passe du familier à l’inconnu, de la stabilité au déséquilibre et par ce processus il se met en danger pour avancer. Le soutien de ses parents est indispensable et on peut comprendre la difficulté des parents à se permettre de lâcher prise. Accepter que son enfant soit en déséquilibre a quelque chose d’ambivalent, car ils doivent aussi le protéger du danger. Les élever de façon trop aseptisée s’apparente peut être à la perte que cela sous-entend pour les parents de ne plus être les garants de cette sécurité ; nombreux sont ceux qui alors font ou pensent à la place de leur enfant.L’exemple de l’enfant qui apprend à faire du vélo sans les petites roues en est une bonne illustration : trouver l’équilibre, tomber, se lancer, recommencer et contrôler son engin avec l’aide des parents qui dans un premier temps le maintiennent par la selle et finissent en l’encourageant par la parole. Ce juste équilibre est valable pour les deux, parents et enfants l’apprennent en même temps sauf que leur dynamique s’oppose pendant que l’un part, l’autre est quitté.
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