L’Ossiano, restaurant étoilé Michelin à l’Atlantis Dubai : « A la recherche du temps perdu » !
- RESTAURANTS, BARS, CLUBS
- Anne Wencelius
- 4 juillet 2022
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Mardi 21 juin. 20h. Lobby de l’Atlantis.
Ça grouille et ça se presse, tantôt en robe de soirée, tantôt en tongs et serviettes de bain, autour du rond-point qu’est la gigantesque œuvre en Murano qui donne le ton tout « Nautilus » de l’établissement. Démesure est ton nom.
Un « agent » réceptionniste nous indique le chemin, vers la gauche, puis nous entrons dans un autre monde, tout aussi aquatique. Vingt mille lieues sous les mers ? Au premier abord, c’est la première référence qui vient à l’esprit : la descente sous l’eau, dans un vaisseau aux armatures métalliques contrastant avec la roche brute des murs qui encadrent une vue souterraine sur le ballet incessant des raies, requins et autres poissonneux qui peuplent le gigantesque aquarium.
Outre le spectacle bleuté des eaux foisonnantes, le décor respire une réelle sobriété, nappes immaculées, un verre à eau, un verre a vin, un bar illuminé bleu Klein pour toile de fond. L’écrin est tout trouvé pour accueillir la cuisine délicieusement nostalgique et actuelle du jeune Chef Grégoire Berger, fraîchement décoré ce jour d’une étoile au firmament de Michelin (félicitations !).
Non, Jules Verne ne sera pas des nôtres à table ce soir, mais plutôt un certain Proust, sans sa madeleine, et à jamais obsédé par le temps écoulé.
La nostalgie commence par cette enveloppe scellée, délicatement posée sous le halo de la lampe de table, comme un indice secret. L’ouvrir c’est découvrir une carte postale surannée où figure la maison de famille du Chef, en Bretagne. Origines.
Puis le menu, qui évoque les périodes de sa vie. L’enfance, marées brumeuses des petits matins. L’adolescence à surfer, les soirées sur la plage et leurs barbecues au coin du feu, puis le jeune homme en voyage, les influences venues d’Asie, les couchers de soleil en Afrique du Sud arrosés à la téquila.
Inlassablement, Grégoire Berger taille une aigue marine iodée, algues, coquillages et poissons. C’est tout son univers qui s’exprime ici. Une sensibilité à fleur d’eau, où l’on sent les obstacles d’une vie et la volonté, obstinée, à les dépasser : « Life starts at the end of your comfort zone » nous répète-t-il.
Le résultat est poétique sans être cérébral, car la main de l’adulte, artisan et technicien, orchestre toute la scénographie. Oui, on vous raconte ici une histoire, un voyage. Il y a derrière ce travail une recherche phénoménale, un souci du produit et de sa métamorphose, d’où l’intitulé du menu « Metanoia ».
La mer déclinée en dix plats, dix vagues qui éclabousseront le palet. Nous nous souviendrons longtemps (la sacrée madeleine n’est jamais bien loin) du Crabe de Bretagne, Kari Gosse et osons dire « Quintessence » de Bouillabaisse, un plat marquant par ses épices et sa chair, et qui par sa succulence nous rappelait le grand Roellinger.
Le poireau sciemment « brûlé » aux palourdes démontre un savant équilibre de douceur et d’acidité, outre la présentation utra-travaillée : deux mains en offrande au feu-follet placé là pour y rôtir son chamallow soi-même.
Le « legine » de Patagonie, poisson au combien tendre et noisette, croûté d’un beignet de charbon et sauce crémée à l’ail restera une découverte, sombre au regard, lumineuse au goût.
Et en guise de bouquet final, un entremet exquis, promenade entre maquis provençal et jardin japonais : glace minute infusée de géranium, citronnelle et romarin, ganache matcha et écume de lait citronnée, meringue en poussière d’algues et basilic.
Alors on se demande : Grégoire Berger est-il à la recherche du temps perdu ? Il semblerait qu’il soit plutôt à la recherche du temps retrouvé.
Et là, la question se pose : une étoile ? Seulement ? Affaire à suivre de près.
Ossiano – Atlantis Dubai
Réservations : 04 426 2626 ou ICI
Suivre le chef : @chefgregoireberger
Suivre le restaurant : @ossianodubai